mardi 30 octobre 2012

« L’illusion confucéenne ou l’impensée économique »


Texte de Sumaya Flores-Bonin

Pairault, Thierry. « L’illusion confucéenne ou l’impensée économique », Outre-Terre, 2006/2 no 15, p. 139-144.

L’auteur, Thierry Pairault, est un sinologue et économiste qui est présentement directeur de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique), situé en France, ainsi qu’enseignant à l’EHESS (Écode des Hautes Études en Sciences sociales). Ses recherchent traitent en grande partie de l’économie de la Chine ainsi que de celle de Taiwan.

Dans son article, Pairault présente ce qu’il appelle l’illusion confucéenne. Il illustre l’expression à l’aide d’une peinture où l’on peut voir une femme de Shanghai, dans les années vingt ou trente, habillée d’une robe qui semble traditionnelle, mais que l’on devine moderne. Elle est coiffée comme une Occidentale, maquillée et fume. Au premier coup d’œil, elle semble tout à fait chinoise, pourtant on voit bien qu’elle est occidentalisée et c’est exactement cela que l’auteur nomme l’illusion confucéenne : « affich[er] un respect minimum pour la tradition » tout en se permettant la liberté d’agir comme un Occidental. Il présente comment ce principe s’applique dans l’économie chinoise, en plus de présenter plusieurs points de vue sur l’économie chinoise depuis le XIXe siècle.

Lorsque la Chine commença à entretenir des liens avec le monde occidental, elle se rendit compte qu’elle était en retard économiquement sur les puissances de l’ouest. Différents personnages émirent leur opinion à savoir quelle était, selon eux, la meilleure façon de rattraper le retard de la Chine. Tout d’abord, il y avait ceux qui croyaient que si la Chine voulait regagner sa place, elle devait à tout prix détruire le passé, se débarrasser de la culture (par exemple le confucianisme) pour pouvoir ainsi procéder à la construction d’une nouvelle identité. C’est le cas de Liang Qichao (1873-1929) qui était un intellectuel réformiste chinois. Il y avait aussi ceux qui, comme Chen Huanzhang (1881-1933), fondateur de l’Académie confucéenne de Hong Kong, croyaient qu’en effet il fallait procéder à des changements à ce qui avait trait au confucianisme, mais qu’au lieu de s’en débarrasser, il fallait l’utiliser pour adapter les pratiques occidentales et les rendre plus chinoises. La façon occidentale de faire des affaires était différente de celle de la Chine. Par exemple, les contrats, qui sont essentiels lorsqu’on fait des affaires en Occident, n’étaient pourtant pas utilisés en Chine, voire même dédaignés. En effet, la confiance était à la base du commerce entre Chinois. Comme le dit Sun Yat-Sen en 1924 : « Quand les Chinois commercent, ils n’ont aucunement besoin de contrat, il leur suffit de se signifier par oral leur accord mutuel. » C’est tout le côté impersonnel des affaires ainsi que l’économie de marché que semblaient redouter les Chinois; le jeu de mots suivant en dit long sur la pensée de l’époque : l’homonyme wàishang signifie à la fois « commerçant étranger » et « blessure ».

Il est intéressant de voir comment le confucianisme ne s’étend pas seulement aux mœurs des Chinois ainsi qu’à la politique, mais aussi à l’économie comme Pairault le présente dans son article. L’idée d’une économie teintée de confucianisme nous ramène une fois de plus aux fameuses « valeurs asiatiques », que l’on peut encore remarquer dans plusieurs pays de l’Asie, non pas seulement en Chine.

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