lundi 29 octobre 2012

L’Essor des grandes puissances : un documentaire-fleuve à la télévision chinoise


Texte deTrinh Phan 

MING, Ye. « L’Essor des grandes puissances : un documentaire-fleuve à la télévision chinoise », Hérodote, 2007/2, n° 125, p. 51-61. DOI :10.3917/her.125.0051

Ye Ming est un docteur en géopolitique de l’Université Paris-VIII et s’intéresse aux enjeux géopolitiques de la Chine sur l’Occident. Son article « L’Essor des grandes puissances : un documentaire-fleuve à la télévision chinoise » expose la Chine lors de sa préparation aux Jeux olympiques (JO) de 2008.

Alors que « tout le monde [les Chinois] n’est pas prêt à renoncer à l’ancienne manière de voir et aux préjudices […] de la guerre froide », la Chine devait être prête à accueillir les JO. Il était nécessaire pour les dirigeants de persuader la population chinoise de collaborer avec eux pour l’événement. En 2006, la chaîne de télévision d’État diffusait L’Essor des grandes puissances (EGP) pour inciter les Chinois à se moderniser selon les termes des dirigeants. Le documentaire employait des termes non marxistes pour expliquer aux Chinois les facteurs de l’essor des grandes puissances, et, surtout, lui transmettre les messages politiques du président Hu Jintao. 

L’EGP utilisait l’histoire pour démontrer à la population qu’elle gagnerait à faire des « compromis » avec les dirigeants pour établir une « sécurité politique de la société chinoise » alors que l’usage de la force pour « changer l’ordre du monde » aboutirait à des échecs. Le documentaire cherchait à amadouer la société chinoise pour « construire la paix perpétuelle, la prospérité commune et un monde où régnerait l’harmonie » dans sa modernisation dirigée par le haut. Cette modernisation était mal perçue en Occident. 


Selon Ming, les tensions entre la Chine et les autres puissances étaient tendues à un tel qu’il était « urgent et nécessaire pour Pékin […] de convaincre le monde que la montée en puissance de la Chine représente plus une aubaine qu’une menace ». La Chine n’est pas une « menace », car « l’harmonie » est au cœur de ses décisions socio-politico-économiques internes et sur la scène internationale. Ces politiques confucianistes servaient à « donner une nouvelle perception de la société chinoise et du monde ». L’« harmonie » représentait l’« identité » de la nouvelle Chine, qui a cessé d’être complexifiée sur des questions d’infériorité par rapport à l’Occident. Elle ne regarde plus ce dernier comme un « agresseur », mais comme « un exemple à méditer ». La Chine va se moderniser, mais à la façon « asiatique » et non à l’« occidentale ». 

À travers cet article, Ming démontre l’utilisation du confucianisme depuis 1983 par le PCC comme un « outil essentiel » de la « modernisation asiatique ». Il met aussi de l’avant la méfiance occidentale envers la Chine. Les sources rassemblées prouvent la xénophobie des puissances à son égard. Ces sources révèlent aussi la difficulté de ces puissances à accepter la montée de la Chine, qu’elles considèrent comme une « contestation » de leur « centralité » et de leur « hégémonie ». Les publications xénophobes justifiaient le sentiment d’urgence de Pékin à changer l’opinion occidentale en sa faveur. 

Ming a publié cet article en 2007, soit pendant que la Chine se prépare aux JO de 2008. Serait-il possible que l’auteur visât à modifier l’attitude occidentale à la faveur de la Chine alors que les tensions grimpaient en Occident juste avant le début des JO? 

Comme Vincent Shen l’a fait au Canada, Ming nous invite lui aussi, de la France, à porter un regard non teinté par la méfiance ou par la crainte sur l’émergence de la Chine en une « modernité asiatique harmonieuse » et de voir ses politiques économiques non pas comme une « menace », mais comme une véritable « aubaine » pour le monde.

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