lundi 3 décembre 2012

Blogging alone: China, the Internet, and the Democratic Illusion?


Blogging alone: China, the Internet, and the Democratic Illusion?

Par David Bilodeau Gonthier

    James Leibold, titulaire d’un doctorat en histoire chinoise, est un maitre de conférences à la « Faculty of Humanities and Social Sciences » de l’université La Trobe en Australie, ainsi qu’un historien politique de la Chine moderne. M. Leibold se spécialise notamment sur le rôle que joue l’ethnicité, la race, et l’identité nationale dans la société chinoise contemporaine. Dans son article paru dans la revue « The Journal of Asian Studies », il cherche à démontrer l’influence de la blogosphère chinoise sur la vie sociale et politique de la société en analysant les comportements et les habitudes des internautes chinois.
Pour réaliser son étude, l’auteur a analysé des sondages sur les habitudes d’utilisation d’Internet, des recherches comparatives, et sa propre expérience avec l’Internet chinois. Il en vient à la conclusion que l’utilisation massive de blogues en Chine ne permettra pas nécessairement de révolutionner drastiquement le pays, car ces blogues, plutôt que de pousser vers une libéralisation du régime, servent surtout au divertissement et produisent de la désinformation.
    M. Leibold ne nie pas le fait que l’Internet a potentiellement le pouvoir de mener à une révolution. Toutefois, il s’est rendu compte que la majorité des Chinois utilisaient le cyber-espace pour des activités ludiques, que ce soit pour télécharger de la musique, jouer à de jeux vidéos, chercher des informations sur ses vedettes préférées, ou tenir un blogue. Il caractérise d’ailleurs ce dernier d’infotainment, un lieu où l’on donne de l’information, souvent inutile d’après l’auteur, dans l’unique but de [se] divertir. M. Leibold admet néanmoins que certains blogues peuvent avoir leur utilité dans le développement de la société chinoise, et que plusieurs discussions portent effectivement sur des questions d’ordre politiques ou sociales, ou critiquent le parti. Mais ces blogues sont rares et sont la plupart du temps noyés dans une marée de divertissement. L’auteur croit ainsi qu’Internet, au lieu de donner du pouvoir au peuple, tend à renforcer le pouvoir gouvernement qui profite alors d’une population qui se dépolitise.

De plus, l’auteur affirme qu’Internet fragmente et isole la société chinoise plutôt que de la rassembler. Il est vrai que les nouvelles technologies de l’information encouragent les discussions et les critiques du politique, mais elles ne permettent pas nécessairement une plus grande ouverture d’esprit des utilisateurs, et la libéralisation qu’elles apportent est souvent mauvaise. L’Internet a favorisé l’individualisme en Chine, mais de manière extrême et futile, où chaque blogue devient une sorte de réseau d’informations centrées sur soi-même (du style Facebook), qui nuit à la cohésion sociale. Les opinions qui sont exprimées sur ces pages tendent d’ailleurs à polariser les croyances des utilisateurs, qui peuvent devenir assez agressifs lorsqu’ils lisent des commentaires allant à l’encontre de ce qu’ils pensent.
L’ouverture de ce média engendre aussi beaucoup de désinformation, car n’importe qui peut écrire n’importe quoi sur le net. L’auteur prend l’exemple du « human-flesh search engines », où n’importe qui peut faire une recherche, à l’aide des blogues, afin de retrouver une personne en particulier, et d’écrire de fausses informations à son sujet. Certaines personnes l’utilisent certes avec discernement, mais cette pratique ouvre la voie à des abus majeurs et à des guerres de vengeances qui n’ont absolument rien à voir avec l’intérêt de la société chinoise.
D’un autre côté, M. Leibold croit tout de même qu’Internet, et plus particulièrement les blogues, peuvent apporter quelques éléments positifs dans la société chinoise. Bien que les messages traitant de la politique ne représentent que 13 % du contenu global des blogues, les blogueurs chinois se permettent néanmoins de critiquer le parti, que ce soit avec des critiques humoristiques du gouvernement, ou de simples discussions entre utilisateurs. Ces agissements démontrent ainsi qu’une démocratie chinoise non officielle semble vouloir se dessiner; démocratie non officielle qui provoque d’ailleurs une plus grande attention portée à la transparence par les membres du gouvernement.
Enfin, il conclut son article en affirmant que, selon lui, il est naïf et prématuré de dire qu’Internet est différent en Chine que dans le reste du monde. Il pense qu’Internet va effectivement transformer la Chine, mais ne considère pas que ces changements seront à ce point radicaux. Il croit aussi qu’il faudrait plus d’études sur le sujet avant de vérifier la nature réelle de ces changements.
    De mon côté, je crois que le texte de James Leibold, bien qu’un peu pessimiste, vient contre balancer les analystes souvent trop optimistes faites par les Occidentaux, pour qui l’Internet apporte automatiquement la démocratie. J’ai surtout l’impression qu’il a cherché à faire ressortir le fait que l’Internet et les blogues en Chine ne sont pas différents d’ailleurs, et que ceux-ci rendent les Chinois aussi stupides que Google le fait avec les Américains. Aussi, le texte de M. Leibold est particulièrement utile, parce qu’il nous permet de mieux comprendre pourquoi une grande partie de la population chinoise (~84 % selon certains sondages) perd confiance en cet outil et désire qu’il soit contrôlé par le gouvernement.

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