mardi 27 novembre 2012

« Digital Communication and Political Change in China »

Ashley Esarey and Xiao Qiang.  « Digital Communication and Political Change in China »   International Journal of Communication 5 (2011), pp. 298–319.

Texte de Parizeault Thierry

Ashley Esarey détient un doctorat en Science politique de l’université de Columbia à New York. À l’université de l’Alberta, il enseigne au département de Science politique et des Études Est-Asiatique. Ses recherches portent principalement sur les politiques domestiques chinoises et ses relations internationales, ainsi que les communications par l’appareil politique et les médias numériques en Chine. Xiao Giang est fondateur et éditeur en chef de China Digital Times, un site internet chinois de nouvelles (bilingue). Il a obtenu un diplôme en journalisme de l’université de Californie à Berkeley et est présentement professeur adjoint à l’école de l’information (School of Information) au même endroit. Ses recherches portent principalement sur le contrôle de l’internet par l’État chinois et c’est pourquoi il dirige le Counter-Power Lab, un groupe d’étudiant de recherche interdisciplinaire qui se penche sur les relations entre les médias numériques, la liberté et l’activisme sur le web.

L’arrivée d’Internet en Chine a obligé l’État chinois à revoir sa manière d’exercer le contrôle de l’information à travers les nouveaux médias. Cette révolution de l’information a véritablement changé les rapports entre celui-ci et les différents acteurs de la société. Même si le développement des technologies de l’information et des communications sont essentiels au développement économique, c’est une arme à double tranchant qui permet aussi de défier et confronter le pouvoir politique du Parti. Affaiblissant son contrôle de l’information, cette révolution a aussi permis de briser le monopole de la mobilisation politique qu’exerçait le Parti par le passé.


L’objectif de cette recherche mené par Xiao et Esarey est de déterminer si les nouvelles technologies de communications numériques ont favorisé un nouveau régime d’information en Chine. Pour bien en comprendre la portée, voici la définition de régime d’information qui sera utilisée.

    (1) a set of dominant properties of political information, such as high cost;     (2) a set of opportunities and constraints on the management of political I    nformation that these properties create; and (3) the appearance of     characteristic political organizations and structures adapted to these     opportunities and constraints (Bruce Bimber 2003)

Un régime d’information change la façon les gens utilisent l’information politique, mais aussi la manière dont ils y ont accès. À l’époque de Mao, la communication politique se faisait à travers la propagande nationale du Parti communiste chinois. C’était grâce au contrôle du Parti sur l’appareil médiatique que ce régime put être mis en place. Dans les années 80, ce contrôle diminua puisque la commercialisation des médias rendit moins essentielle la participation de l’État. Cepedant, cela obligea celui-ci à créer des institutions capables de superviser le contenu politique comme la General Administration of Press and Publications (GAPP) ainsi que le State Administration of Radio, Film and Television (SARFT). C’est véritablement dans les années 2000 que le régime d’information chinois a subi sa plus récente transformation. Un certain nombre d’incidents se sont rapidement et largement répandus à travers toute la Chine par le biais des médias numériques. Cela a forcé l’État chinois à faire des concessions politiques majeures, transformant et influençant la mise en place de ses politiques.

Pour comprendre la nature de cette transformation, Xiao et Esarey analysent le contenu de quelques centaines de blogues et de neuf quotidiens (soit plusieurs milliers d’articles de Beijing, Shanghai et Guangzhou) et mettent par la suite en relief les différences d’informations que l’on y retrouve. L’analyse se fait selon quatre critères soit le pluralisme (diversité des points de vue sur une même information), la critique (certaines formes de critique politique et sociale) ainsi que la propagande nationale et locale (dont l’intention est d’orienter l’opinion publique). Les résultats montrent un nombre beaucoup plus important de pluralisme et de critique ce qui confirme l’hypothèse que les auteurs de blogue on tune plus grande liberté en ce qui concerne le contenu. Une autre étude a été menée afin de voir si, avec le temps, des concepts comme la liberté d’expression, le droit et la démocratie se faisaient plus présents chez les blogueurs. Les chercheurs ont remarqué qu’en effet, le nombre de blogues où ces termes ont été mentionnés (de manière positive) a considérablement augmenté entre 2004 et 2010. Cela montre que la liberté d’information et que le souci démocratique se fait de plus en plus important.

Il est intéressant de voir dans quelle mesure cette nouvelle révolution numérique est en train de changer le visage de la Chine. Elle permet l’émergence de nouvelles institutions qui peuvent profiter de ces transformations du régime d’informations pour offrir une libéralisation renouvelée au sein de l’appareil médiatique. Au fur et à mesure que l’État s’adapte à cette nouvelle réalité, les internautes font de même en trouvant de nouvelles manières d’exprimer leurs opinions et points de vue pour éviter le contrôle et la censure du Parti. Bien que ces changements deviennent plus clairs avec le temps, il sera intéressant de voir comment l’État fera pour conserver sa mainmise sur ce régime d’information alors que les « netizens » voient leur pouvoir d’expression et de mobilisation accroître considérablement avec l’apparition et l’expansion de ces nouvelles technologies numériques.

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